
En avril dernier, le monde apprenait la mort du pape François, figure de proue d’une des institutions les plus riches et puissantes sur Terre. Après un conclave fortement médiatisé, c’est finalement l’américain Robert Francis Prevost qui a été choisi pour lui succéder, sous le nom de Léon XIV.
La mort de François a déclenché une avalanche de louanges pour ce pape supposément « progressiste », y compris de la part de personnalités et groupes de gauche.
Tout au long de sa carrière, il a en effet tenté de se présenter comme un allié des pauvres et des opprimés, rejetant les privilèges et le spectacle associés à sa position pour se contenter d’une existence modeste. En Argentine, en tant qu’archevêque, il continuait d’utiliser les transports en commun, et au Vatican, il a refusé de s’établir dans les résidences luxueuses normalement réservées aux papes pour se contenter des chambres d’invités. Dans les derniers mois de sa vie, il s’entretenait régulièrement avec les chrétiens à Gaza qui se rencontraient sous les bombes israéliennes.
Mais la vérité est que tout comme Saint-François d’Assise au XIIIe siècle, duquel il a tiré son nom, le rôle de François Ier aura été de nettoyer la réputation d’une institution corrompue, profondément liée au statu quo capitaliste et de plus en plus détestée.
L’Église catholique, depuis le IVe siècle, est un des piliers fondamentaux sur lesquels les classes dirigeantes du monde s’appuient pour gouverner, et maintenir les inégalités sociales en place. Son rôle fondamental est d’offrir aux classes opprimées un paradis après la mort, en échange d’accepter passivement l’enfer sur Terre que représente leur existence actuelle. Elle a historiquement servi à empêcher les masses pauvres de se rebeller contre leurs maîtres, qu’il s’agisse des seigneurs féodaux au Moyen-Âge ou des capitalistes aujourd’hui.
Cependant, dans les dernières décennies, l’Église est entrée dans un lent déclin, un phénomène qui est parallèle à la crise de confiance qui existe aujourd’hui envers toutes les autres institutions de l’establishment capitaliste. En Europe et en Amérique, les fidèles désertent les églises : en Allemagne uniquement, ce sont trois millions de paroissiens qui ont quitté l’institution depuis 2000. Même en Amérique latine et en Afrique, où le nombre absolu de fidèles continue d’augmenter, l’Église officielle se fait doubler par la multiplication des sectes évangéliques.
De plus, l’Église est depuis longtemps ensevelie sous une tonne de scandales de pédophilie, de blanchiment d’argent, d’évasion fiscale et de corruption; scandales qui sont fort probablement ce qui a causé la démission surprise du pape Benoît XVI en 2013.
François Ier avait donc la mission de faire oublier ces scandales et de redorer l’image de l’Église aux yeux des masses de plus en plus radicalisées. Mais cette mission était impossible. C’est pour cette raison qu’il faisait des déclarations contre « l’idolâtrie de l’argent », mais qu’il ne présentait pas d’alternative au capitalisme; qu’il approuvait la bénédiction des couples homosexuels, mais qu’il s’opposait toujours au mariage homosexuel; et qu’il était en faveur d’administrer les sacrements aux politiciens pro-avortement, mais qu’il considérait toujours l’avortement comme un péché mortel.
Quant au nouveau pape, peu importe ses intentions, il se retrouvera dans la même situation. Il est d’ailleurs intéressant de souligner que le nom qu’il a choisi, Léon XIV, est une référence explicite au pape Léon XIII (1878 à 1903), père de la « doctrine sociale de l’Église ». Celle-ci, adoptée dans une période d’intensification de la lutte des classes marquée notamment par la commune de Paris de 1871, visait essentiellement à ramener le mouvement ouvrier naissant dans les canaux sécuritaires de l’Église, et loin des idées dangereuses du socialisme et du matérialisme philosophique. De la même manière, aujourd’hui, Léon XIV devra composer avec une radicalisation croissante de la classe ouvrière face à la crise du capitalisme, et tentera à nouveau de canaliser la colère des masses dans la direction d’illusions et de vœux pieux.
Pour la classe ouvrière et les pauvres du monde entier, il est indifférent de savoir qui se trouve au sommet de l’institution catholique. Elle demeure une institution réactionnaire, et incapable d’offrir une véritable solution aux horreurs et à la souffrance qu’engendre tous les jours le système capitaliste.