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Les 935 travailleurs du Syndicat des employés du transport public du Québec métropolitain (SETPQM) menacent d’entrer en grève du 1er au 16 juillet. Sans convention collective depuis un an, les travailleurs du Réseau de transport de la Capitale (RTC) revendiquent des salaires qui suivent l’inflation et de meilleures conditions de travail pour faire face à la pénurie de main-d’œuvre. Alors qu’une loi spéciale plane déjà à l’horizon, il faut se préparer à la défier. Une victoire des chauffeurs du RTC en plein Festival d’été de Québec (FEQ) démontrerait toute la force de la classe ouvrière.

Des miettes pour le transport en commun et ses employés

Comme de nombreux services publics, le RTC souffre d’une pénurie de main-d’œuvre causée par un manque de financement et des salaires trop bas. 

Le manque d’employés dans le RTC oblige les chauffeurs à travailler dans des horaires extrêmement exigeants, au point que certains n’ont même pas le temps d’aller aux toilettes entre les trajets. Le RTC a eu le culot de leur dire que s’ils voulaient ce privilège ultime, ils n’avaient qu’à l’obtenir dans leur prochaine convention collective.

Le manque de financement affecte non seulement les conditions de travail des chauffeurs, mais également celles des travailleurs de l’entretien. Beaucoup d’équipements utilisés dans le réseau, dont les autobus eux-mêmes, sont de piètre qualité et nécessitent un entretien constant. À cela s’ajoute un manque de formation pour préparer les travailleurs aux nouvelles technologies intégrées dans le réseau. Tous ces facteurs ont un impact direct sur la qualité du service du RTC et les trajets sont de plus en plus retardés ou annulés.

Le syndicat de l’entretien du RTC avait déjà signalé ces problèmes à l’employeur en 2019, et pourtant rien n’a encore été fait pour y remédier. Au contraire, la partie patronale cherche à faire taire ses employés en intimidant les officiers syndicaux et en retardant les négociations. 

Les conditions déjà misérables des chauffeurs du RTC risquent de s’aggraver dans les prochaines années. Avec l’arrivée du tramway qui devrait augmenter l’achalandage des autobus à Québec, les effets de la pénurie de main-d’œuvre se feront encore plus sentir. 

En fin de compte, quelqu’un doit bien payer pour maintenir les services. Le RTC a mis en place une hausse moyenne des tarifs de 2,5%. C’est donc à la classe ouvrière de payer pour le manque de financement dans le transport en commun.

Faire travailler plus longtemps ses chauffeurs, couper les coins ronds en se procurant de l’équipement de moindre qualité, ou augmenter les prix des billets en pleine période d’inflation : ce sont les « solutions » patronales utilisées contre la classe ouvrière pour couvrir un manque de financement dans le transport en commun.

La loi spéciale dans le coffre à outils du patronat

Les chauffeurs d’autobus jouent un rôle important dans l’économie. Des milliers de travailleurs se déplacent quotidiennement via le RTC. Une grève dans le réseau perturberait donc directement les activités normales de nombreuses entreprises.

D’autant plus, la grève aura lieu en même temps que le FEQ qui se déroule du 6 au 16 juillet. Cet événement majeur génère habituellement des retombées économiques de plus de 20 millions de dollars, avec plus de 300 000 déplacements en autobus durant cette période.

La grève sera un coup dur pour les profits des patrons. Les chauffeurs du RTC ont entre leurs mains un levier puissant, qui pourrait leur permettre d’aller chercher des gains considérables.

Pour le maire Bruno Marchand, la grève tiendrait les citoyens de Québec en « otage ». Il va même jusqu’à utiliser l’argument malhonnête que la grève mettrait en danger les plus vulnérables et nuirait aux plus démunis.

Il s’agit là du discours classique du patronat visant à monter une partie des travailleurs contre les grévistes sous un couvert « progressiste ». 

En réalité, ce n’est pas la grève qui retient les citoyens en « otage », mais plutôt les administrations municipales et gouvernements bourgeois qui laissent les transports en commun se détériorer depuis des années par le sous-financement, forçant maintenant les travailleurs du RTC à entrer en grève pour défendre ce service public.

Les usagers des transports en commun doivent déjà subir une hausse des tarifs et une dégradation du service offert. Récemment, la CAQ a même directement réduit le budget du RTC, en coupant les fonds d’urgence reliés à la pandémie. Ce sont ces attaques austères dans les services publics qui détériorent réellement les conditions de vie des plus vulnérables et pauvres. Si quelqu’un est à blâmer pour le déclenchement de la grève, c’est bien les patrons qui refusent de négocier et les gouvernements qui sous-financent depuis des années le transport en commun. Les chauffeurs du RTC ont toute la légitimité de lutter pour de meilleurs salaires et des conditions de travail adéquates.

Bien que le droit de grève du SETPQM soit reconnu sur papier, l’histoire du mouvement montre qu’aucun droit des travailleurs n’est acquis, et qu’il faut se battre pour les défendre. Le maire et la présidente du RTC envisagent déjà la possibilité de faire appel au gouvernement pour appliquer une loi spéciale de retour au travail. 

C’est précisément pourquoi les patrons du RTC ne mettent aucun effort à la table de négociation, même s’ils disent le contraire dans les médias. Ils n’ont pas intérêt à négocier avec le syndicat s’ils savent qu’une loi spéciale sera utilisée pour mettre fin à la grève.

Dans les dernières années, au Québec et au Canada en général, les gouvernements bourgeois ont eu souvent recours aux lois spéciales pour sauver les patrons d’une grève. Même si officiellement ces lois spéciales sont inconstitutionnelles, cela n’empêche pas les gouvernements de les adopter, quitte à ce qu’elles soient déclarées illégales après de longues procédures judiciaires qui prennent des années. 

Si une telle loi se présente, la direction du SETPQM doit mobiliser ses membres pour la défier. Même avant que la grève ne soit déclenchée, les membres du comité interne de mobilisation ont de leur propre initiative mis en place des moyens de pression sans mot d’ordre de leurs dirigeants syndicaux. Cet élan de la base doit être mis à profit pour mener la lutte jusqu’à la victoire. 

La classe ouvrière mobilisée a le pouvoir de faire échec aux lois antidémocratiques des gouvernements des patrons. Les chauffeurs du RTC peuvent s’inspirer des travailleurs et travailleuses du secteur de l’éducation de l’Ontario, qui ont réussi à défier la loi spéciale imposée par le gouvernement Ford en novembre dernier.

La lutte des chauffeurs du RTC pour de meilleures conditions de travail est également celle pour un financement massif dans le transport en commun. Une victoire serait une victoire pour l’ensemble de la classe ouvrière de Québec, qui gagne à avoir des transports en commun de qualité.

Solidarité avec le SETPQM!
Il faut défier les lois spéciales!