
Le 20 septembre, le Canada, aux côtés de la France et du Royaume-Uni, a reconnu l’État de Palestine. Avec l’arrogance habituelle des dirigeants occidentaux, ils ont tous parlé comme si leurs paroles changeaient le cours de l’histoire. Ce spectacle cynique de « reconnaissance » a servi à détourner l’attention de ce qu’Israël est réellement en train de faire sur le terrain.
Quelques semaines auparavant, Israël avait approuvé le plan E1, appelé « colonie de la fin du monde » (doomsday settlement). E1 est une bande de terre d’environ 1200 hectares en Cisjordanie, située entre Jérusalem-Est et la colonie illégale de Ma’aleh Adumim.
Le plan approuvé divise la Cisjordanie en deux cantons. Se rendre de Ramallah à Hébron, par exemple, nécessiterait d’emprunter des routes de contournement contrôlées par Israël, ce qui rappelle le système des bantoustans de l’apartheid en Afrique du Sud.
Jérusalem-Est, longtemps envisagée comme la future capitale d’un État palestinien, serait encerclée par des colonies et complètement coupée du reste de la Cisjordanie. En bref, il ne resterait plus aucun territoire contigu pouvant être qualifié de « Palestine ».
Cette décision intervient après une année marquée par une escalade de la violence et des tensions en Cisjordanie.
En janvier, l’opération « Mur de fer » a été lancée, la plus grande campagne menée par l’armée israélienne en Cisjordanie depuis des décennies. Des bulldozers blindés ont suivi les frappes aériennes israéliennes contre des villes et des camps de réfugiés. Les infrastructures routières, hydrauliques et d’égouts ont été délibérément prises pour cibles, tandis que des quartiers résidentiels entiers ont été détruits.
Plus de 40 000 Palestiniens ont été déplacés, ce qui représente le plus grand déplacement de population en Cisjordanie depuis 1967. La campagne menée par l’armée israélienne ouvre la voie aux colons.
La violence des colons a atteint des niveaux sans précédent cette année, avec plus de 200 communautés palestiniennes brutalisées. En outre, une « unité d’intervention rapide » relevant de la police de Cisjordanie a été créée, composée de colons. Elle a effacé toute frontière entre les forces de sécurité et les milices messianiques des colons. Le mouvement des colons agit désormais avec une impunité absolue.
Puis, en mai, alors que l’armée israélienne lançait son offensive terrestre à Gaza, le gouvernement israélien a approuvé rétroactivement la création de 22 nouvelles colonies dans la Cisjordanie occupée. Le processus d’enregistrement foncier a été entièrement revu, annulant toute reconnaissance des registres fonciers palestiniens dans la zone C (60% de la Cisjordanie).
Comme tout acte de nettoyage ethnique, il s’agit là d’une violation flagrante du droit international. Mais les médias occidentaux ont observé un silence complice à l’égard de cette mesure.
En juillet, les sionistes ont clairement affiché leurs intentions. Une résolution non contraignante visant à annexer l’ensemble de la Cisjordanie a été adoptée à la Knesset à la quasi-unanimité.
Tous les leviers du pouvoir – décisions judiciaires, motions parlementaires, budgets de colonisation et violence de l’armée israélienne – ont été utilisés pour dominer économiquement et politiquement l’ensemble de la Palestine historique, avec la complicité des puissances occidentales.
E1 était autrefois une « ligne rouge » que les puissances occidentales insistaient de ne pas franchir – jusqu’à présent. The New Arab a rapporté :
« Pendant des décennies, Washington et Bruxelles ont clamé haut et fort qu’une telle mesure sonnerait le glas de l’État palestinien, entraînerait l’effondrement du droit international et marquerait un point de non-retour.
Pourtant, alors qu’Israël démantèle ouvertement toute possibilité d’avenir pour les Palestiniens, l’Europe reste silencieuse, les États-Unis se rendent complices et la communauté internationale assiste passivement à l’effacement des Palestiniens. »
À ceux qui soutiennent le vœu pieux d’une solution à deux États, promettant la reconnaissance d’un État palestinien, nous demandons : où cet État est-il censé se trouver? À Gaza, enseveli sous les décombres? En Cisjordanie, morcelée en enclaves isolées et étranglées? En Arabie saoudite, comme l’a récemment raillé Netanyahou?
L’État palestinien prospère que vous imaginez pour demain importe peu lorsque vos actions ont fait en sorte qu’il ne reste plus rien aujourd’hui qui puisse être appelé Palestine.