«Je suis à une paie près d’être à leur place »

À Québec, les propos haineux d’un restaurateur contre les personnes itinérantes ont suscité l’indignation, révélant une colère grandissante contre un système qui criminalise les pauvres pendant que les véritables responsables de la misère s’enrichissent.
  • Kelly-Anne et Giovanni, Québec
  • jeu. 13 nov. 2025
Partager

« La ville devrait avoir un lieu de rétention, idéalement l’ancien poste de police. »

À en croire ces propos, on pourrait penser que la ville de Québec est aux prises avec de dangereux criminels. Pourtant, ils ont été tenus à l’égard des personnes itinérantes par un restaurateur connu du quartier Saint-Roch, Napoléon Woo, qui se présentait cet automne à la course électorale municipale.

Monsieur Woo ne s’est pas arrêté à dire qu’il faudrait mettre les plus pauvres en prison. Il s’est aussi indigné lors du lancement de sa campagne d’une « culture » de l’itinérance qu’il faudrait abolir.

En effet, selon le commerçant, il y a des itinérants à cause… du filet social! Des gens choisiraient de vivre dans la rue, puisque ça leur permettrait de ne pas avoir à travailler et d’être logés et nourris gratuitement, sans risquer de mourir de froid. Les travailleurs précaires du quartier étaient heureux d’apprendre de la bouche de M. Woo, que « personne n’a besoin de travailler pour vivre, à Québec ». Vivons-nous dans une utopie sans le savoir depuis tout ce temps?

Sarcasme à part, M. Woo, ne retirant pas les mots qui ont fait scandale, s’est retiré de la campagne électorale après seulement quelques jours, affirmant dans une entrevue qu’il était « écœuré des médias ». En vérité, ses propos n’ont pas passé auprès de la communauté et des comités qui se sont empressés de dénoncer de tels mensonges.

Marx écrivait dans Le Capital que « l’accumulation de richesse à un pôle signifie donc en même temps à l’autre pôle une accumulation de misère ».

Cette misère se manifeste entre autres avec une montée de l’itinérance, particulièrement dans le quartier Saint-Roch à Québec. C’est une situation qui empire depuis quelques années avec la hausse des coûts du logement, tandis que les refuges du quartier manquent de ressources.

La semaine dernière, un passant, s’adressant à une camarade du quartier qui était témoin d’une intervention policière envers une personne itinérante, lui a dit que « c’est complètement hypocrite de criminaliser le fait d’être pauvre. Je vis dans un 4 et demi pis j’arrive pas… Avant ces gens-là me dérangeaient, mais aujourd’hui je sais que je suis à une paie près d’être à leur place ».

Cet homme avait entièrement raison. La classe dirigeante criminalise des gens qui n’ont nulle part d’autre où aller que dehors.

La tactique de diviser pour mieux régner ne fonctionne plus comme avant. Les mensonges haineux de Monsieur Woo envers les opprimés ne sont pas passés auprès de la population, car une couche grandissante qui avait auparavant des préjugés envers les itinérants, s’identifie à leur sort.

Ceux qui font en sorte qu’il y a des gens sans toit sont les mêmes à qui nous payons difficilement le loyer chaque mois. Ce sont eux, les vrais criminels.