Le « woke » Geoff Molson vs. les nationalistes identitaires

Les nationalistes identitaires du Québec, dans leur croisade contre l’ennemi « woke », ont trouvé une nouvelle cible pour le moins inattendue : Geoff Molson, propriétaire du Canadien de Montréal.

  • Julien Arseneau
  • lun. 25 oct. 2021
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Les nationalistes identitaires du Québec, dans leur croisade contre l’ennemi « woke », ont trouvé une nouvelle cible pour le moins inattendue : Geoff Molson, propriétaire du Canadien de Montréal.

Le Canadien a effectivement annoncé – oh, horreur! – que l’équipe ferait une déclaration de reconnaissance du territoire autochtone au début de ses matchs à domicile.

Il n’en fallait pas plus pour que Mathieu Bock-Côté, Joseph Facal, Richard Martineau et autres chroniqueurs du Journal de Montréal sortent de leur trou.

« Devra-t-on remplacer l’hymne national par des chants traditionnels amérindiens? » demande Martineau. Facal parle d’un CH qui « se met à ramper devant le wokisme ». Bock-Côté y voit « une forme d’expropriation symbolique ».

Qui est surpris?

Il a dû être pénible au cours de l’été 2021 pour ces réactionnaires d’observer le fantastique mouvement de solidarité envers les Autochtones suite aux découvertes macabres sur des terrains de pensionnats. Pas facile de casser du sucre sur le dos des imaginaires wokes et des opprimés quand une telle solidarité existe.

Mais le mouvement s’est calmé depuis, et le coup de marketing du CH leur a donné le prétexte idéal pour relancer leur « lutte ».

Comme d’habitude, faisant écho à son armée de chroniqueurs nationalistes, le gouvernement de la CAQ s’est mêlé de la partie. L’ancien flic devenu ministre responsable des Affaires autochtones, Ian Lafrenière, affirme que le CH a fait erreur. 

Ces nationalistes se cachent derrière le fait que la présence mohawk à Montréal est remise en question par des historiens. Mais peut-on douter un seul instant qu’ils auraient réagi différemment, même sans ce débat historique? On peut être certains qu’ils auraient trouvé un autre prétexte pour s’opposer à la reconnaissance du territoire. Sous la pression des nationalistes, le message a été modifié pour retirer les références aux Mohawks. Cela ne changera certainement pas l’attitude hostile de Bock-Côté et compagnie.

Ne vous inquiétez pas! Vous n’êtes pas en train de lire une défense des capitalistes de la famille Molson par les marxistes. On parle ici des gens qui ont mis en lock-out leurs employés de Toronto cet hiver pour empirer leurs conditions de travail et qui ont récemment supprimé 140 emplois à Montréal. Si seulement leur équipe pouvait gagner ses matchs! 

La famille Molson, tout comme beaucoup d’autres au sein de la classe dirigeante canadienne, réalise que l’opinion publique n’a jamais été aussi favorable envers les luttes des Autochtones qu’aujourd’hui. C’est pourquoi ces riches qui n’ont jamais levé le petit doigt pour régler les problèmes très concrets des peuples autochtones sont soudainement si attirés par ces gestes symboliques. 

Mais l’État canadien et la classe dirigeante auront beau mettre tout le vernis pro-Autochtones qu’ils voudront sur leurs institutions, le chômage, la répression et la misère continueront chez ces peuples tant que le capitalisme canadien tiendra debout. Il ne faut pas se laisser berner par leur symbolisme.

Mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit pour la gang du Journal de Montréal

Le courant nationaliste dominant au Québec, porté par la CAQ et ses porte-voix dans les médias, cherche à créer une « unité nationale » autour d’une prétendue identité québécoise. 

Comme des joueurs de soccer se jetant à terre au moindre contact, ces nationalistes pleurnichent devant toute manifestation, aussi petite ou symbolique soit-elle, des ennemis multiculturalistes, wokes, islamo-gauchistes, étudiants, écolos, communistes, etc. comme une menace pour l’identité québécoise.

Mais ce genre de tempête dans un verre d’eau participe à faire oublier que ce sont les capitalistes, tant Geoff Molson que Pierre-Karl Péladeau, propriétaire du JdeM, qui sont la vraie menace aux travailleuses et travailleurs du Québec, qu’ils soient Autochtones ou non-Autochtones, immigrants ou non, partisans du CH ou non.