
La CAQ montre son vrai visage. L’annonce des coupes de 570 millions de dollars en éducation représente la suite d’une série d’attaques ayant suscité la colère généralisée et l’effondrement des appuis au gouvernement.
Ces coupes s’ajoutent aux 600 millions de dollars coupés l’an dernier et à un autre de 70 millions de dollars en mars de cette année. Pour faire respecter ces mesures, le ministre a interdit aux écoles d’enregistrer des déficits. Pour les administrateurs d’écoles qui luttent depuis des années avec de maigres budgets, des choix difficiles devront être faits.
Le résultat inévitable est évident : moins d’enseignants et de professionnels spécialisés, des coupes dans l’aide alimentaire, le tutorat et le soutien direct aux élèves, des fermetures de classes et une dégradation générale du système d’éducation.
Le programme de la bourgeoisie
Mais ces coupes ne sortent pas de nulle part. Depuis longtemps, le programme de la classe dirigeante québécoise consiste à réduire les dépenses sociales afin de rendre la province plus compétitive sur le marché mondial. Elle veut moins de services sociaux, moins d’impôts pour les riches, plus de privatisations et des syndicats plus faibles.
Le manifeste Pour un Québec lucide, rédigé en 2005 par l’ancien premier ministre péquiste Lucien Bouchard et ses amis, en était l’expression la plus claire. Depuis ce temps, tous les gouvernements, de Charest à Marois en passant par Couillard, ont loyalement suivi les diktats de la bourgeoisie.
Résultat, les deux principaux partis, le Parti québécois et les libéraux, se sont effondrés en 2018, tandis que la CAQ s’est hissée au pouvoir. Vu par bien des gens comme un « nouveau » parti et surfant sur une vague anti-establishment, Legault et la CAQ ont fait toutes sortes de promesses, allant jusqu’à dire que « même si le Québec devait faire face à un ralentissement économique, le financement de l’éducation sera protégé. » Quelle hypocrisie!
Mais la CAQ ne pouvait ultimement pas éviter l’inévitable. La classe dirigeante a besoin d’austérité.
L’agence de notation Standard & Poor a récemment baissé la cote de crédit de la province, menaçant de le faire à nouveau si les finances du gouvernement ne s’améliorent pas. La guerre commerciale constitue une crise existentielle pour le capitalisme québécois, qui vend environ 85% de tous ses produits sur le marché américain. La crise économique se traduira par une baisse des revenus de l’État, tandis que la baisse de la cote de crédit signifie qu’il en coûtera plus cher à l’État d’emprunter pour se financer.
Dans ce contexte, la nécessité pour la classe dirigeante québécoise de procéder à des mesures d’austérité est plus forte que jamais. Et la CAQ est heureuse de prendre le taureau par les cornes. En plus des coupes en éducation, elle a imposé des coupes en santé qui ont déjà mené à l’abolition de 1300 postes. Ils ont aussi légalisé la vente d’électricité par des producteurs privés avec la loi 69, ouvrant la porte à la privatisation d’Hydro-Québec.
Et puis, il y a eu la loi 89, qui limite sévèrement le droit de grève. Ainsi, en plus d’imposer l’austérité, la CAQ sort l’artillerie lourde pour limiter la capacité des syndicats de riposter.
Le hic, c’est que ce programme est largement impopulaire chez les travailleurs. Sans surprise, la CAQ est à son plus bas dans les sondages en dix ans, à 15-17% des intentions de vote. Les dernières projections lui donnent zéro siège à l’Assemblée nationale!
Seule la classe ouvrière peut vaincre la CAQ
Mais le fait que la grande majorité de la population ne soutient pas la CAQ ne l’empêchera pas d’imposer le programme de la classe dirigeante québécoise. Comme ils disposent d’une majorité de 86 sièges sur 125 à l’Assemblée nationale, ils pourront faire passer leur programme de régression sans problème. Les prochaines élections n’ayant lieu qu’en octobre 2026, le parlement n’offre aucun moyen de bloquer ces attaques.
Nous ne pouvons pas simplement attendre les prochaines élections. De plus, alors que le Parti québécois est en tête dans les sondages, nous ne devrions pas nous faire d’illusions sur ce parti. Nous nous souvenons tous du bref passage au pouvoir de Pauline Marois, qui avait mis en œuvre son propre programme d’austérité. Et nous ne devrions pas oublier que le gouvernement péquiste a écrasé les infirmières en 1999.
La seule façon de défendre nos conditions de vie et nos services, c’est de se battre.
Instinctivement, la classe ouvrière a commencé à bouger et un mouvement de masse se prépare. Juste après l’annonce des nouvelles coupes en juin, des manifestations spontanées de parents ont été organisées. Également, « Ensemble, unis pour l’école », une coalition regroupant des syndicats du milieu de l’éducation, des comités de parents et des membres de directions scolaires, vient d’être formée.
Mais ce potentiel pour construire un mouvement dépasse le secteur de l’éducation. Il est évident pour quiconque porte attention que ce gouvernement ne vise pas seulement le système d’éducation.
Il est donc dans l’intérêt de l’ensemble du mouvement syndical de se mobiliser contre ce gouvernement. Les conditions d’un mouvement de masse à l’image de 2012 ou 2015 sont clairement réunies alors que des millions de personnes se retournent aujourd’hui contre la CAQ. La haine envers la CAQ est largement répandue. Ce gouvernement est plus faible que jamais. Il ne manque qu’un point focal.
Le député de Québec solidaire Sol Zanetti a appelé à un « soulèvement national contre l’austérité en éducation ». Nous sommes tout à fait d’accord.
Avec un mouvement généralisé, des manifestations de masse, des rassemblements et des grèves dans les secteurs touchés spécifiquement par les coupes, la classe ouvrière a le pouvoir de repousser ces attaques. Les syndicats doivent utiliser leurs vastes ressources pour rendre possible un tel mouvement.
Seule la classe ouvrière peut vaincre la CAQ.