
Le philosophe Hegel disait que ce qui est rationnel est réel, et ce qui est réel est rationnel. Mais aujourd’hui, au contraire, la réalité a l’air totalement irrationnelle. Si l’on lit les journaux, il est facile d’en venir à la conclusion que l’humanité a perdu la tête.
Côte à côte avec la faim, la maladie et la misère généralisée, règnent l’opulence, le luxe, le gaspillage à grande échelle.
Alors qu’il y a urgence de réparer les systèmes de santé et d’éducation, de bâtir des logements et d’agir contre la crise climatique, les puissants consacrent les richesses de la société à fabriquer des bombes, à développer des chatbots glorifiés, à spéculer dans les cryptomonnaies et à puiser toujours plus d’hydrocarbures.
Et alors que l’on assiste impuissants à l’extermination systématique de tout un peuple, en direct sur nos téléphones, les gens qui ont du pouvoir s’en servent pour soutenir ce massacre avec des armes, de l’argent et un appui politique.
Les jeunes en particulier sont sensibles à cet état de fait. Alors que les plus vieilles générations peuvent se souvenir d’un passé où le capitalisme était capable d’offrir une vie tolérable pour une couche relativement importante de la population, un jeune entrant à l’université cet automne est né alors qu’éclatait la Grande récession de 2007-2008.
Militarisme et guerres, inégalités sociales grandissantes, système politique dominé par les milliardaires, racisme et sexisme qui ne s’améliorent pas, réchauffement climatique qui rend la vie de plus en plus intolérable : l’avenir qui s’offre aux jeunes est véritablement dystopique – sans les qualités esthétiques des films de science-fiction.
Pourtant, personne n’a de solution réelle à offrir aux jeunes générations. La politique est un cirque et les politiciens sont des clowns. La stupidité et la médiocrité font aujourd’hui partie des critères d’embauche pour diriger un parti politique.
Et pendant que la droite blâme les immigrants et s’enfonce dans les théories de la conspiration, la gauche s’enfonce la tête dans le sable.
Tout ce monde détourne le regard de l’éléphant dans la pièce : le capitalisme. Car quel résultat un système fondé sur la recherche des profits et la propriété privée des entreprises par un petit nombre de milliardaires – quel résultat un tel système pourrait-il donner autre que l’inégalité, la corruption, la tyrannie, la destruction environnementale?
Il y a une expression qui dit que la raison d’être d’un système est ce qu’il fait. C’est particulièrement clair pour le capitalisme. L’économie est contrôlée par une poignée d’énormes monopoles, de banques, de fonds d’investissement, entre les mains d’une mince couche de milliardaires, qui organisent la société pour maximiser leurs profits. L’exploitation de la majorité (les travailleurs) par la minorité (les capitalistes) constitue l’essence de ce système.
Quiconque veut sérieusement mettre fin à cet état de fait doit donc reconnaître que la solution passe par le renversement de ce système économique. Tant que l’économie demeurera contrôlée par les milliardaires, il n’y aura pas d’espoir de sérieusement régler les problèmes urgents qui nous affectent. La dictature des capitalistes doit être remplacée par une démocratie des travailleurs. Il faut une révolution contre les milliardaires.
Une telle révolution ne peut être menée par des amateurs. Cette classe sociale – la bourgeoisie – a plus d’un siècle d’expérience à gouverner. Elle a appris à maintenir son système par toutes sortes de moyens : par la manipulation, la division et la corruption, ou par la force si nécessaire. Elle ne quittera pas la scène de l’histoire d’elle-même.
Notre seul espoir est de former un parti se préparant à extirper ces parasites. Un tel parti, un parti communiste, ne peut être improvisé du jour au lendemain. Être communiste, c’est reconnaître la nécessité de s’organiser pour renverser le capitalisme, et s’atteler à cette tâche de longue haleine avec détermination.
Mais, bonne nouvelle, une telle révolution ne repose pas entièrement sur nos épaules. Partout où l’on regarde à travers le monde, les masses se soulèvent, sans qu’un parti communiste soit là pour les pousser. Dans les dernières années, des mouvements de masse ont eu lieu aux quatre coins du monde, du Kenya, au Bangladesh en passant par la Serbie.
Un tel soulèvement est inévitable ici aussi. Nous devons être prêts pour le mener à la victoire quand il surviendra.
Le vieux Hegel n’était pas fou. Ce qu’il voulait dire était que ce qui est irrationnel est destiné à devenir irréel, c’est-à-dire à périr. Ce qui est irrationnel aujourd’hui n’est pas le monde, mais le système économique qui gouverne le monde. Il a simplement besoin qu’on lui donne une poussée.