Le 28 mai, la chroniqueuse Marie-Eve Fournier a pondu un article odieux dans La Presse, intitulé « Pourquoi les salaires dans la construction sont-ils si élevés ? ». Elle s’y attaque aux travailleurs de la construction résidentielle tout juste entrés en grève au Québec. Sa thèse centrale : les femmes seraient mal payées… parce que les travailleurs des métiers masculins comme la construction le sont trop!
Cet article révoltant n’a pas manqué de faire rager les grévistes sur les lignes de piquetage, comme nous l’a rapporté l’un de nos membres en grève.
Un compagnon (un travailleur de trois ans d’expérience) fait un salaire de base d’environ 62 500 dollars pour une bonne année. Les heures supplémentaires peuvent faire varier ce montant, mais elles ne sont aucunement assurées. Si, pour Mme Fournier, il s’agit là d’un salaire « si élevé », de combien propose-t-elle d’appauvrir les travailleurs de la construction? 10 000 dollars? 20 000 dollars?
Surtout, l’idée qu’augmenter le salaire des hommes se ferait au détriment des femmes est absolument fausse. En réalité, les augmentations de salaires chez une partie de la classe ouvrière ne se font pas au détriment des autres travailleurs, mais au détriment des profits des patrons.
Loin de nuire aux femmes, une hausse pour les travailleurs de la construction profiterait au reste des travailleurs, y compris aux travailleuses. Quand une partie de la classe ouvrière obtient un meilleur salaire, cela crée une pression à la hausse sur le salaire de tout le monde. Les travailleurs des autres secteurs sont encouragés à se battre pour plus; les patrons doivent monter les salaires pour attirer des employés. Inversement, chaque défaite crée une pression à la baisse sur le salaire des autres corps d’emplois – y compris les emplois traditionnellement féminins.
La meilleure manière d’augmenter les conditions des femmes dans les emplois mal payés est que chaque grève, qu’il s’agisse des CPE, de la construction, d’employés d’entretien, de profs ou d’infirmières, soit soutenue à 100% par les autres travailleurs, et que cette solidarité force les patrons à nous concéder une plus grande part de la richesse que nous produisons.
Bien sûr, l’article ne parle jamais des marges de profit des entreprises. Ce n’est pas un hasard. L’objectif de ce genre d’idées n’est pas d’améliorer la condition des femmes, mais de voiler la division de classe au sein de la société et de fomenter la division au sein de la classe ouvrière entre les hommes et les femmes, pour nous affaiblir tous.