Le 31 mai dernier, le gouvernement du Québec a annoncé que les étudiants du cégep et des universités de la province retourneront sur les campus en personne dès l’automne prochain, à condition que la campagne de vaccination progresse suffisamment. Cependant, aucune mesure concrète n’a été annoncée pour assurer un retour en personne sécuritaire. 

L’annonce du retour en classe est une nouvelle encourageante pour les étudiants. L’isolement a eu des conséquences graves sur la santé mentale de ceux-ci. De plus, l’enseignement à distance nuit à l’apprentissage et on parle de plus en plus d’un retard en éducation dans le pays durant la pandémie. Ainsi, après plus d’un an où les gouvernements ont échoué à endiguer la propagation du virus, le retour sur les campus est accueilli avec un soupir de soulagement. Mais si 15 mois de pandémie nous ont appris quoi que ce soit, c’est que la CAQ n’est pas capable d’assurer notre sécurité au travail et à l’école. 

Pas si sécuritaire que ça

Le gouvernement affirme qu’étant donné que la tendance des cas est à la baisse, et que la plupart des gens seront vaccinés en septembre, son plan pour la rentrée est sécuritaire.

La réalité est qu’il reste plusieurs inconnus, notamment autour des vaccins et des variants. L’apparition du variant Delta, venu d’Inde, vient compliquer les choses. Ce variant est plus transmissible et plus résistant aux vaccins. Une dose unique du vaccin est bien moins efficace contre lui. Cela signifie que le taux de vaccination nécessaire pour atteindre l’immunité collective augmente. D’ailleurs, l’Angleterre, pourtant bien plus avancée dans sa vaccination, repousse d’un mois son déconfinement en raison de la propagation du variant Delta.

Il y aussi la possibilité de nouvelles mutations du virus qui pourraient créer des souches résistantes aux vaccins actuels. En plus de la vaccination, des mesures de distanciation seraient nécessaires pour diminuer au maximum le nombre d’infections et empêcher une mutation accélérée du virus. 

Le gouvernement a affirmé que si la situation empire, la rentrée en classe devrait être annulée. En annonçant en grande pompe que le masque et la distanciation ne seront pas nécessaires des mois à l’avance, le gouvernement suscite encore une fois des espoirs qu’il pourrait ne pas être capable de satisfaire si la situation empire. Il risque ainsi d’ajouter à la confusion et à la frustration au sujet des mesures sanitaires. 

La passivité du gouvernement

Malgré le risque réel de devoir annuler le retour sur les campus, ou que celui-ci ne soit pas sécuritaire, le gouvernement Legault reste passif. 

Un retour en classe sécuritaire nécessiterait d’engager plus de professeurs afin de réduire la taille des classes et de permettre une distanciation physique. Il faudrait aussi améliorer l’aération et la qualité de l’air dans les classes (tel que recommandé par l’INRS) et appliquer un dépistage et un triage des cas systématique dans les écoles. Dans les cas où il serait nécessaire de retourner à l’enseignement en ligne, suffisamment de ressources devraient être mises à la disposition des étudiants pour que chacun ait accès à de l’aide et un suivi individuel. Ces mesures pourraient être planifiées tout au long de l’été et seraient toutes plus efficaces que le plan actuel de déconfinement improvisé.

Mais du point de vue du gouvernement, la santé des étudiants ne pèse pas assez lourd dans la balance. En effet, ces mesures demanderaient d’investir pour engager du nouveau personnel ou acheter de l’équipement, alors que l’éducation postsecondaire est chroniquement sous-financée depuis des décennies dans la province.

Les gouvernements du PQ et des libéraux qui se succèdent depuis des décennies au Québec ont créé cette situation. Le sous-financement a été accompagné de mesures comme le dégel puis l’augmentation des frais de scolarité et la présence accrue du privé en éducation. 

Ces gouvernements de patrons préfèrent compter leurs cennes plutôt que de financer adéquatement l’éducation des nouvelles générations et de la rendre accessible aux enfants de la classe ouvrière. La CAQ poursuit cette tradition, elle qui avait promis à peine 20 millions de dollars pour les écoles primaires et secondaires pour le déconfinement de l’automne dernier! 

La CAQ ne nous donnera rien sans lutte. Il est donc impératif que le mouvement étudiant se mobilise pour demander des ressources suffisantes dans les campus et pour l’embauche de plus de personnel pour assurer la sécurité de tous et toutes. Des assemblées générales devraient être organisées le plus tôt possible sur les campus pour discuter de la mobilisation.

Aucune confiance dans la CAQ

Tout le monde souhaite pouvoir revenir à l’école en personne le plus tôt possible, et il faut tout faire pour éviter d’avoir de nouveau recours à l’enseignement en ligne généralisé. 

Mais le passé récent nous indique que nous ne devons avoir aucune confiance envers le gouvernement de la CAQ pour gérer le déconfinement des écoles postsecondaires. 

Pendant le confinement, les étudiants ont souffert et ont été soit complètement ignorés par le gouvernement, soit infantilisés par Legault, qui avait résumé les problèmes des étudiants à ne pas pouvoir « se faire une nouvelle blonde, un nouveau chum ».

La situation dans les écoles primaires et secondaires a également été une vraie catastrophe. L’été dernier, alors que tout pointait vers la possibilité d’une deuxième vague, le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, n’a absolument rien fait pour améliorer la qualité de l’air dans les classes. Pas d’argent pour ça les écoles, chez la CAQ! 

Résultat : plus de la moitié des écoles avaient des systèmes de ventilation défaillants une fois la rentrée 2020 commencée, ce qui a contribué à des éclosions. 

Pire encore : le ministre a ensuite menti pendant des semaines en affirmant que la qualité de l’air dans les écoles avait été vérifiée selon des protocoles attestés par la santé publique. Pourtant, elle n’a jamais soutenu ces protocoles.

Maintenant, Radio-Canada nous apprend que le ministère de l’Éducation « songe » seulement à évaluer la qualité de l’air dans les cégeps et les universités. Mais peut-on faire confiance à un gouvernement qui a non seulement échoué à protéger les élèves et le personnel des écoles, mais a ensuite menti pour se couvrir? La réponse est non.

Pour combattre le virus, démocratie sur les campus 

Pour un retour en classe sécuritaire, le personnel de l’éducation et les étudiants ne peuvent compter que sur eux-mêmes. Ce sont eux qui connaissent leur réalité, et non les bureaucrates du ministère de l’Éducation supérieure, plus proches du ministre des Finances que des étudiants; ni les différents Conseils d’administration qui dirigent les écoles dans l’intérêt du patronat. La meilleure façon de prévenir toute éclosion à la rentrée serait une gestion démocratique des établissements d’enseignements par les employés et les étudiants. 

Avec l’appui d’experts en santé publique, le personnel et les étudiants pourraient aider à appliquer des mesures efficaces, évaluer lesquelles sont nécessaires et lesquelles sont superflues.

Il faut donc à la fois lutter pour obtenir les ressources nécessaires pour un retour en classe sécuritaire, mais aussi demander que ces ressources, et les campus en général, soient contrôlés démocratiquement par les étudiants et les employés. C’est la seule façon d’éviter une propagation accrue du virus dans les campus et donc un reconfinement, ce qui serait dramatique pour de nombreux étudiants. C’est aussi la meilleure manière d’assurer une éducation de qualité et de bonnes conditions d’apprentissage pour tous les étudiants. Voilà la voie à suivre pour le mouvement étudiant!