Le bulldozer libéral

Les libéraux ont déposé et adopté en vitesse des projets de loi majeurs qui donnent le ton pour les prochaines années : l’État se donne des outils pour contourner la réglementation environnementale, attaquer les immigrants et augmenter la surveillance policière.

  • Benoît Tanguay
  • mar. 8 juill. 2025
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Le nouveau premier ministre Mark Carney n’a pas perdu de temps pour se mettre à la sale besogne des patrons.

Les libéraux ont déposé et adopté en vitesse des projets de loi majeurs qui donnent le ton pour les prochaines années : l’État se donne des outils pour contourner la réglementation environnementale, attaquer les immigrants et augmenter la surveillance policière. 

S’ajoute à cela une augmentation massive des dépenses militaires, qui sera payée par des « compromis » ailleurs dans le budget fédéral, dans les mots de Carney – un euphémisme pour parler d’austérité. 

Certains se disent surpris de l’ampleur des attaques de Carney, et d’à quel point il gouverne « à droite ». En fait, nombreux sont ceux qui ont remarqué que Carney se rapproche même de Trump. 

Celui qui s’est fait élire sur la promesse de « tenir tête » aux attaques protectionnistes de Washington accumule les capitulations devant le bully de Mar-A-Lago.

Il a commencé par plier aux demandes de Trump sur les dépenses militaires, acceptant la cible de 5% du PIB demandée par celui-ci. 

Puis, plus récemment, il s’est fait tordre le bras pour abandonner la taxe que le gouvernement Trudeau avait adoptée sur les grandes plateformes numériques américaines. 

Sa nouvelle loi sur l’immigration, une autre capitulation à Trump, ouvre la porte à des déportations de masse comme celles qu’on voit actuellement aux États-Unis. 

Concernant cette loi, un article du journal britannique The Guardian résume bien la question que doivent se poser bien des gens sur l’ensemble des mesures de Carney : « Les Canadiens ont dit non à Trump – Alors pourquoi Mark Carney avance-t-il un projet de loi de style MAGA? »

Ceux à gauche qui nous disaient qu’il fallait voter Carney comme « moindre mal » pour stopper les conservateurs de Poilievre doivent maintenant s’en mordre les doigts. Les conservateurs ne savent plus comment attaquer les libéraux, parce que ceux-ci ont adopté leur programme.

Mais il ne s’agit pas des politiques propres à Carney ou à Poilievre. Entre eux n’existe qu’une différence de degrés. 

En dernière analyse, tous les politiciens bourgeois servent les mêmes maîtres dans les conseils d’administration des banques et des grandes entreprises. Le moindre mal est et à toujours été le même mal.

Le programme de Carney est le programme du capitalisme en crise. 

Et la situation est critique pour la bourgeoisie canadienne. 

Déjà, le Canada traînait de la patte par rapport au reste des économies avancées. La dette fédérale gonflait sans arrêt. La barque de l’économie canadienne prenait l’eau, souffrant d’une faible productivité et d’une dépendance au marché américain. Le tout dans un contexte de croissance économique anémique et d’inflation à l’échelle mondiale.

Mais la crise s’est précipitée avec la guerre commerciale déclenchée par Trump. Si l’on ajoute à cela l’échauffement rapide des rivalités inter-impérialistes entre l’Occident et les nouvelles puissances (Russie et Chine), qui pousse à un réarmement rapide, on obtient les conditions pour une tempête parfaite.

Ainsi, la classe dirigeante demande un programme choc pour sauver son système en crise – un programme choc que Trudeau n’avait pas le sang suffisamment froid pour appliquer. 

Les Dieux du Capital exigent des sacrifices sur l’autel du profit – et c’est à la classe ouvrière qu’ils demandent de verser son sang. 

Le capitalisme en crise ne peut permettre la moindre miette superflue aux travailleurs. Tout obstacle à l’exploitation capitaliste doit être écrasé. Tout va passer sous le bulldozer.

Les milliardaires exigent plus de pipelines, plus de mines, plus de grands projets d’infrastructures, plus de dépenses militaires, plus de subventions aux entreprises, plus de coupes d’impôts, plus de privatisations, plus d’exploitation – et moins de services publics, moins de protection environnementale, moins de droits pour les travailleurs, moins de syndicats, moins de filet social. 

Pour l’instant, Carney trône toujours au sommet des sondages. Les effets des mesures de Carney ne se sont pas encore fait sentir. 

Mais la classe dirigeante joue avec le feu. Quand la grande masse des travailleurs va réaliser l’ampleur des attaques à son encontre, sa colère fera pâlir celle qui régnait contre Trudeau en comparaison. 

De plus en plus de gens remettent déjà en question le capitalisme. Ces attaques ouvriront les yeux à encore plus de travailleurs, qui verront bien que ce système et tous les politiciens qui l’acceptent ne servent que les riches. 

Comme communistes, nous devons nous assurer de leur fournir les explications nécessaires et les gagner au programme révolutionnaire, seul capable de régler la crise profonde du capitalisme pourrissant.